Avec des mangas

Publié le 17 Mars 2024

Adèle était une jeune fille rangée, bien comme il faut ; sage et belle, elle était plutôt adepte du peace and love. Robe longue, petits nœuds et ruban, toute de rose et de fuchsia vêtue, cheveux longs et blonds, les yeux délicatement et mignonnement maquillés, elle plaisait beaucoup aux garçons. Mais, prude et timide, délicate et très croyante, elle avait décidé de rester vierge jusqu’au mariage.

Sa sœur, un peu sauvage et impertinente, plutôt rock and roll et Métal Hurlant. Même si elle portait parfois, comme sa sœur, une robe longue, elle préférait mettre des jeans déchirés et un peu crasseux. La nuit, adepte de l’urbex, elle s’éclipsait dans des lieux under ground.

Leur maman, marchande de fruits et légumes qui tenait son étal devant le palais du Prince de Monaco, souriait à tous les passants, son commerce était prospère. Spécialisée en tomates (Marmande, cœur de bœuf, Rose de Berne, Fandango, Supersteack, tomates anciennes et autres Miel du Mexique), elle avait du succès auprès de tous les bobos du coin, y compris Stéphanie, la plus jolie (!). Elle ignorait bien sûr les frasques nocturnes de sa fille aînée.

Et voilà qu’un jour la sœur d’Adèle annonce qu’elle est invitée à Paris par son petit ami, un jeune homme bien propre sur lui que leur mère a déjà rencontré. Elle sait présenter les choses, arrondir les angles et elle annonce si bien les choses à sa mère...

   - "Les examens seront finis, c’est juste avant de partir tous en vacances, ça ne dure que le temps d’un week-end".

... que la mère accepte bien volontiers que ses deux filles aillent faire un peu de tourisme à la capitale.

 

   - "Ça vous fera du bien, vous avez beaucoup et bien travaillé cette année, surtout toi, Adèle ! Vous l’avez bien mérité".  

Une fois les examens terminés (et brillamment réussis !), tout particulièrement Adèle, bien sûr, les voilà parties à l’aventure. D’abord le sage TGV. Arrivées à Paris, M. qui les attendait sur le quai les emmène immédiatement sur leur terrain de jeu, station Balard. Il est un peu tôt et les voyageurs du métro parisien sont encore assez nombreux à se presser dans les rames dont ils sortent et entrent sans cesse. Le trio attend assis sur un banc. Vingt-trois heures trente, plus personne. Ils descendent les quelques marches qui rejoignent les voies en contrebas du quai et, immédiatement à droite s’engouffrent dans un couloir étroit, sombre et bas de plafond.

Puis, peu à peu un vague jour apparaît tamisé à travers une verrière couverte de poussière. Des tags, serpent vert, masque de citrouille d’Halloween, bulbes verts et même, incongrues dans ce décor complètement glauque, une jolie tomate bien rouge (qui leur fait penser à leur gentille maman).    

M. s’arrête, pose son sac et en sort un cutter et une puissante lampe torche.

   - "Alors comme ça, tu es la petite Adèle, si mignonne et si sage ? Toujours identique à toi-même, rien de changé depuis la dernière fois à ce que je vois !?"        

À ces paroles de M. Le Maudit, le regard de la sœur aînée se charge de cruauté, Cruella se réveille en elle.

   - "Alors tu n’as pas peur ?"

Il siffle et trois garçons et une fille jusqu’alors tapis dans le noir, face au mur, vêtus de survêtements noirs à capuche, baskets noires se retournent et apparaissent. Leurs visages sont démoniaques. Piercings sur tout le visage, tatouages noirs et rouges du front au menton, les yeux injectés de sang, les veines saturées d’une drogue propre à rendre agressive la moindre petite limace. Tous sont armés d’un immense cutter.

M. Le Maudit actionne son briquet et enflamme le contenu de trois barillets posés au sol. Une odeur écœurante de chair brûlée se dégage, une fumée âcre et noire obscurcit encore, autant que cela soit possible, l’atmosphère confinée de la pièce.

La jolie et gentille Adèle a compris depuis bien longtemps que c’en était définitivement fini pour sa vie. Elle allait mourir ici, c’est sûr !

M. Le Maudit, chef de cette bande immonde et petit ami de sa sœur, Cruella, s’approcha d’’elle. Elle prit soudain son courage à deux mains et ses jambes à son cou. Las, … Les quatre lascars la saisirent, la ramenèrent et la plaquèrent contre le mur.

M. Le Maudit lui annonça :

- "Ah, tu aimes la langue française, la bonne littérature, Victor Hugo est ton héros !? Tu connais donc L’homme qui rit ?! "           

Et d’un coup de cutter à chaque coin de la bouche il entama la chair tendre et blanche.

   - Et voilà La femme qui rit ! hurla sa sœur en transe. Ah, putain, c’est réussi ! Elle saigne comme un goret. La vache, notre mère va être triste si tu meurs. Et si tu vis elle ne te reconnaîtra pas… Achevons le travail !

D’un coup de machette sortie du sac de M. Le Maudit elle lui trancha la main droite. Adèle était évanouie depuis longtemps.

  • Allez les gars, on sort de ce trou à rats !

Une fois posée sans connaissance sur l’escalator, la bande s’égailla dans les rues de Paris comme une volée de corbeaux et disparut.

Arrivées en haut Cruella tira sa sœur sur le trottoir et hurla

  • AU SECOURS ! Aidez-moi ! Vite, une ambulance …

Un passant, qui passait, rare à cette heure tardive dégaina aussitôt son téléphone portable et forma le numéro des pompiers.      

Quand Adèle, après plusieurs jours de coma, se réveilla, elle avait comme un sale regard satanique … 

MARTINE

 

 

Rédigé par Martine Silberstein

Publié dans #Textes personnels

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