Espoir
Publié le 15 Mars 2019
Espoir
1
Petite fille de Chagall en ton isba ou poupée russe en ta synagogue,
sous ce ciel d’or embrasé,
ton chat a vu arriver le tyran.
Innocente enfant pour ton bel oiseau prisonnier, ouvre tes mains.
Liberté à tous les opprimés, tous les condamnés aux travaux forcés.
Fillette douce, fillette de papier,
ton sourire figé sous ta couronne de carnaval, vois comme luisent les larmes autour de ton visage
hier tendre, aujourd’hui tôt usé.
Ta chevelure de jais jonche le sol, mêlée aux ras cheveux gris d’hommes âgés, aux boucles blondes de petits bonhommes encore au sein.
2
Tous ces corps nus, sans pudeur, entremêlés dans la puanteur de ce bunker fermé.
Visages crispés, bouches bées, respirations coupées, horreur figée.
Tous ces corps après corps, corps après corps, corps après corps, transportés en brouettes stridentes dans ces bouches rougeoyantes, de cheminées surmontées, partent en fumée
Fumées des pensées des uns vers la Paix, d’un autre vers son champ, d’un troisième vers l’espérance, de tous vers un monde meilleur, plus tard, plus tard, plus tard…
Et ce chien, qui ne dit rien et n’en pense pas moins.
3
Ce chien étonné de tant de haine, ce chien joueur gratte la terre, belle terre arrosée de toutes ces gouttes, de toutes ces larmes, de tous ces gens, de tous ces peuples
Tziganes, fous, juifs, communistes, homosexuels, handicapés, résistants, enfants,
d’où un jour naîtra un Homme nouveau, un Homme juste, un Homme tolérant, un Homme grand,
une Femme tolérante, une Femme juste, une Femme nouvelle, une Femme grande.
de tous ces êtres jailliront de nouvelles graines d’enfants,
des enfants éduqués, des enfants ouverts, des enfants instruits, nouveaux, justes, bons, tolérants.
Une nouvelle civilisation qui n’oubliera pas son passé, qui avancera vers un futur meilleur
où les petites filles auront des tracteurs ou des poupées, les garçons des dinettes ou des robots.
Tous auront des livres que nul ne brûlera
4
Les fleurs repousseront,
l’eau coulera à nouveau, douce et claire,
des ponts l’enjamberont.
Les habitants de cette terre nouvelle se rencontreront,
ils reconstruiront des maisons.
Le ciel sera dégagé de toute funeste fumée.
Les chiens continueront de poursuivre les chats
les enfants de tirer la queue des chiens
les martins pêcheurs de pêcher des poissons
les poissons de gober des moucherons
Le monde tournera rond, rond, rond
comme le ballon de cette innocente enfant
comme le ventre rond de cette femme épanouie
rond comme la bouille de ce petit garçon
5
Les graines germeront
les champs de blé s’étendront
les tournesols tourneront
le liseron grimpera
le soleil éclairera la terre
les nuages le cacheront
le vent le poussera
laissant apparaître de brillantes éclaircies
Et tout redeviendra comme avant cet immense désastre
6
La neige recouvrira ce qui reste du camp d’Auschwitz.
Ses baraquements conservés, ces fours que l’on peut observer, son mémorial où l’on peut se souvenir.
Des groupes d’enfants du monde entier, accompagnés des derniers déportés rescapés parcourront les allées d’où nul cri, nulle plainte ne surgira plus.
I
Loin vers l’infini s’étendent
Des grands prés marécageux.
Pas un seul oiseau ne chante
Sur les arbres secs et creux.
Refrain
Ô terre de détresse
Où nous devons sans cesse
Piocher, piocher
II
Dans le camp morne et sauvage
Entouré de murs de fer
Il nous semble vivre en cage
Au milieu d'un grand désert
III
Bruit des chaînes et bruit des armes
Sentinelles jour et nuit
Et du sang, des cris, des larmes,
La mort pour celui qui fuit.
IV
Mais un jour dans notre vie
Le printemps refleurira
Libre enfin, ô ma patrie
Je dirai tu es à moi.
Dernier refrain
Ô terre d’allégresse
Où nous pourrons sans cesse
Aimer, aimer
Après eux, seuls resteront les témoins de papier, les films, et les enregistrements audio permettant à chacun de se souvenir et de dire : « Plus jamais ça »